À partir de Montréal pour atteindre Blanca, c’est un vol vers Philadelphie puis 1h10 d’escale, un deuxième vol de 7h15min. vers Madrid, une attente de 4h50min (dont j’ai profité pour visiter Madrid) puis 4h de train vers Murcia où je suis restée 3h avant de prendre l’autobus qui m’a emmenée à ma destination finale à 21h le soir du 1er février. J’étais heureuse qu’on m’attende à l’arrivée, c’est rare. D’ailleurs, on m’avait aussi déposée au départ à Montréal, c’était de bon augure. Et même, quelle joie, un arbre du voyageur m’attendait à la gare de Madrid. C’est par tous ces intervalles que j’ai transité de la neige aux palmiers. Ici, c’est l’été pour la québécoise que je suis.
Blanca est une petite ville calée entre les collines qui encadrent la vallée du Rio Segura. Le lieu est gorgé de lumière. C’est de plein fouet qu’entre le soleil du matin par les portes vénitiennes de mon studio qui surplombe la ville, en montant vers le »Castillo». La petite ville enlace la rivière et s’étend sur les versants des collines où les rues laissent place à un labyrinthe de passages et d’escaliers. Là, d’anciennes fermes ont jadis occupé de petites casas d’une pièce qui contenaient ici des poules, là des lapins, un ou deux cochons et des habitant.e.s. Cette époque est révolue. De ces constructions anciennes, les plus hautes juchées sont en ruines, les murs à moitié érodés servent de cachette à des dépôts de rebuts et aux nombreux chats errants que l’on aperçoit dans les escaliers de la ville. Les constructions plus basses sont coquettement emménagées par la vie d’aujourd’hui.
Je suis en plein décalage horaire. À 10h, je voudrais dormir; j’ai les yeux grands ouverts à 5h du matin. Je n’ai pas besoin de montre ici; les cloches des églises sonnent les quarts, les demie, les trois-quarts et les heures qui se présentent ainsi: les quatre coups pour annoncer l’heure ronde, puis le nombres d’heures en questions. En ce moment, il est 19h02 mercredi. Les cloches sonnent une série de carillons aux 5 minutes et à répétition, puis le nombre d’heures en question. Il y a un signal que je ne comprend pas. J’aurai le temps, deux mois pour apprendre.
Ici, d’autres artistes sont aussi là et viennent de Belgique, d’Argentine, d’Espagne… Tiens! maintenant les carillons jouent le »Ave Maria». Le clocher de l’église est illuminé le soir. Depuis une demie-heure on entend à intervalles de petites détonations sèches. Ah, et puis voici un avion militaire qui vient de raser les toits de la ville. Le son du bolide persiste et survole encore les alentours. Va savoir… Décidément, je ne suis pas encore des leurs.